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vendredi 29 août 2025

Short Cuts (1993), de Robert Altman

 

« Ouais, les poissons rouges, tu sais, j’suis pas très fana… Ca nage dans l’aquarium et ça chie. »

C’est l’histoire, dans le Los Angelès des années 90, de neufs couples et vingt-deux personnages. Ils sont parents, amis ou voisins et partagent joies et peines, plaisirs et drames. Des destins pris dans le tourbillon de la vie.

Le Magnolia avant Magnolia, en (un peu) mieux. Quand on met le DVD de Short Cuts dans son lecteur, c'est avec plus d’excitation et d’attentes que lorsqu’on fait le même geste avec, au hasard, un Desplechin (vous y aurez aussi droit prochainement). Première constatation : c’est un pavé (trois heures ! Même le making-of fait 90 minutes, soit la durée d'un film...). Deuxième constatation : quel putain de casting (Andie MacDowell, Jack Lemmon, le chanteur et musicien Tom Waits, Julianne Moore, Matthew Modine, Anne Archer, Jennifer Jason Leigh, Chris Penn, Robert Downey Jr., Madeleine Stowe, Tim Robbins, Frances McDormand)… Mais est-ce qu’un putain de casting, ça fait un putain de film ? Pas forcément mais disons que ça aide. Troisième constatation, qui découle un peu de la seconde : on a donc droit à un film choral, avant que ça ne devienne une mode (dans la foulée de Magnolia, justement). Et ça tombe bien, je suis plutôt client du genre. On connait la formule : un tel est marié avec une telle qui le trompe avec un troisième, qui bosse avec un quatrième, qui connait une cinquième, qui etc… Là, on a des coucheries, un fait divers (trois pêcheurs qui découvrent un cadavre de femme dans la rivière), des rapports familiaux conflictuels (une mère chanteuse de jazz dans des bars et sa fille violoncelliste) et pour l’émotion, un drame (un enfant écrasé par une voiture, qui luttera contre la mort avant de décéder). Le film dépeint l’Amérique de ces années post-Reagan et Bush père (le démocrate Bill Clinton vient de s’installer à la Maison Blanche), en pleine croissance économique. Les posters de joueurs NBA (basket), de Metallica ou des Guns, qui cartonnaient à l’époque, ramènent immanquablement à ce début des années 90, cette décennie coincée entre la chute du mur de Berlin et les attentats du 11/9. C’est terrible, rien ne fait envie dans cet « American way of life » effrayant de conformisme et de consumérisme anarchique, ces vies dupliquées à l’instar des baraques avec pelouse alignées en rang d’oignon qui les abritent, ces intérieurs chargés en bibelots, ces cuisines bourrées de bocaux et d’ustensiles, ces tables bordéliques, ces « barbeuc » ou pique-niques avec nappes à carreaux rouges et blancs, les émissions TV débiles, les mioches qui crient ou pleurent, le petit clebs qui aboie… Les mecs sont flic, chauffeur, conducteur d’hélicoptère, nettoyeur de piscine, médecin, présentateur TV ou chômeur, les nanas peintre, musicienne, serveuse, clown, opératrice de sexe téléphonique ou femme au foyer. Au rayon réjouissances : Jennifer Jason Leigh en « téléphone rose » à domicile, balançant propos salaces (du genre « oh oui, ma culotte est déjà toute mouillée » ou « tu aimes que je te lèche les couilles ? ») à ses clients tout en changeant son bébé, devant ses autres enfants et son mari (Chris Penn, disparu à seulement 40 ans et frère de Sean), qu’on sent frustré par la situation ; Frances McDormand se grattant le cul en retournant se coucher après avoir répondu au téléphone à son futur ex-mari ; ledit futur ex-mari qui bazarde l’appartement de cette même McDormand en son absence ; ou encore Julianne Moore qui, chatte et fesses à l’air (P.S : contrairement à notre Mylène Farmer, c’est une vraie rousse…) mais en chemisier, avoue, sous la menace de son mari (Matthew Modine), l’avoir trompé il y a quelques années avec un ami peintre comme elle, scène de ménage ayant lieu quelques heures avant qu’ils ne reçoivent à dîner la « femme clown » (Anne Archer) et son mari pêcheur de truites. Le reste (les monologues de Lemmon, Robbins en flic irascible, Tom Waits en soûlard), c’est un peu plus inégal. Mais comme j’aime ce genre de films où les histoires et les personnages s’imbriquent astucieusement, on va dire que le positif l’emporte largement sur le négatif.

dimanche 8 juin 2025

Le coût de la vie (2003), de Philippe Le Guay

 

« Mon p’tit, pour sucer des bites, il faut du talent, tu sais… »

C’est l’histoire de six personnages qui se côtoient ou se frôlent et de leur rapport à l’argent : un restaurateur (Vincent Lindon) qui préfère « taper dans la caisse » pour faire des cadeaux ou investir plutôt que de payer ses dettes URSSAF ; un de ses cuistots (Lorànt Deutsch), lui aussi plutôt du genre généreux ; une jeune fille (Isild Le Besco) qui refuse de toucher à son héritage afin d’être aimée pour elle-même et pas pour son argent, embauchée comme serveuse dans ledit restaurant grâce au cuisiner ; une escort-girl de luxe sans état d’âme (Géraldine Pailhas) ; un homme sujet à constipation (Fabrice Luchini), radin comme pas deux bien que « friqué » ; un homme d’affaires richissime (Claude… Rich… Un nom prédestiné 😄) qui s’apprête à prendre sa retraite, indifférent aux drames humains provoqués par les délocalisations de son empire industriel. Il y a donc les « cigales » et les « fourmis », les cyniques et les « romantiques »…

DVD trouvé à… 50 cents dans un Cash Express mais… dans sa version promotionnelle : « Ne peut être vendu ni loué » apparaît en bas de l’écran tout au long du film, sans que cela soit trop gênant. Après Le prix à payer, Cliente et Libre échange, voilà donc encore une comédie (dramatique) où il sera question d’argent et de cul et/ou d’amour (bref, ce qui fait « tourner » - pas bien rond - ce monde…). Cet argent qui corrompt, pervertit et finalement nous tue. Et si un grand acteur, c’était un comédien capable de dire une réplique improbable de façon tout à fait naturelle ? Comme Claude Rich, qui nous sort cette « perle » citée plus haut lorsque Le Besco lui dit qu’elle « préfèrera encore sucer des bites sur l’autoroute plutôt que de toucher à son héritage » (et comme Marielle dans Tenue de soirée ou Michel Bouquet dans Les côtelettes. En 2025, un grand acteur, ça bouffe les pissenlits par la racine, en somme). Dans le rôle de l’infirmière que Rich tente en vain de séduire, on reconnait Chloé Mons, qui fût la dernière épouse du regretté Alain Bashung. Film choral bien construit et bien trouvé mais pas de nature à nous « donner la banane », tant il nous rappelle trop le morose quotidien (la vie de famille, les délocalisations, les banques…) et la prégnance du Dieu Argent sur nos vies esclavagisées.

mardi 4 mars 2025

Magnolia (1999), de Paul Thomas Anderson

 

C’est l’histoire d’une dizaine de personnages qui se croisent ou pas mais ayant tous un lien entre eux. Un film « choral », donc. Il y a là un infirmier au chevet d’un mourant, sa femme dépassée par les évènements, son fils, conférencier masculiniste qui le déteste au plus haut point, un gentil flic « droit dans ses bottes », une junkie abusée sexuellement dans son enfance par son père, lui-même condamné par la maladie et présentateur d’un jeu télévisé auquel participe un enfant surdoué dont le père ne voit en lui qu’un moyen de gagner de l’argent. Et enfin, un ancien vainqueur de ce jeu cherchant à séduire par tous les moyens la personne qu’il aime (ouf !).

Y’a qui dedans ? Du lourd : Philip Seymour Hoffman, Julianne Moore, John C. Reilly, William H. Macy (inoubliable dans Fargo) et notre scientologue au sourire « Ultra Brite », Tom Cruise himself.

Et c’est bien ? A voir, oui mais pas nécessairement à conserver. Malgré les trois heures, on ne s’ennuie pas, le récit est fluide. Mais le film n’échappe malheureusement pas aux bons sentiments, aux scènes « tire-larmes », aux situations et personnages prévisibles (le bon flic au « grand cœur », le pauvre type en manque d’affection, le mec qui regrette ses péchés sentant sa fin proche…). Y’a même la chanson pop ultra-consensuelle typique que tous les personnages chantonnent au même moment (en mode « les sentiments sont universels, on est tous pareil dans nos différences », toussa…).

Pluie de crapauds : oui

Femme à poil : non

Up 👍: la réalisation virtuose ; le scénario, quand même bien torché

Down 👎: des clichés ; Moore et surtout Cruise qui en font des caisses (c’est bon, t’as pas eu l’Oscar du Meilleur second rôle mais t’as eu le Golden Globes…)