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lundi 15 septembre 2025

Chute libre (1993), de Joel Schumacher

 

« Ils m’embarquent ! Je disparais, messieurs-dames. Voilà ce qui arrive quand on n’est pas « économiquement viable » ! Allez, au revoir tout l’monde ! Au revoir, ne vous laissez pas faire ! Au revoir tout l’monde, au revoir ! Ne m’oubliez pas. »

Réalisation : Joel Schumacher

Scénario : Ebbe Roe Smith

Pays :  Etats-Unis

Année : 1993

Genre : policier, drame

Avec : Michael Douglas, Robert Duvall, Barbara Hershey, Rachel Ticotin.

Synopsis : A Los Angeles, sous un soleil de plomb, un homme d’une cinquantaine d’années, d’apparence d’employé de bureau mais en réalité chômeur, quitte subitement son véhicule bloqué dans un embouteillage dans le but de rejoindre sa fille, dont il est divorcé de la mère, pour fêter son anniversaire. Ayant maille à partir, lors de son parcours, avec un commerçant asiatique puis des délinquants chicanos, l’inspecteur Prendergast, à un jour de la retraite, se lance à sa poursuite.

Pourquoi ? Pour Michael Douglas, cheveux ras et en brosse, qui enchaine bien après Basic Instinct avec ce rôle ambigu de « gentil méchant » ; pour la musique idoine de James Newton Howard, un spécialiste des B.O ; pour la scène d'introduction et celles du McDo, du terrain de golf, du manifestant devant la banque et du vendeur néo-nazi ; parce qu’une fois n’est pas coutume, une production Warner ne se contente pas du pur divertissement et propose une réflexion, même sommaire, sur l’état de la société américaine post-Reagan (pauvreté, individualisme, mercantilisme…) tout au long du parcours de cet ancien employé qui se sent déconsidéré et déclassé alors qu’il a toujours fait ce qu’on lui a demandé (bref, trente ans plus tard, ce serait un électeur de Trump ou, chez nous, un « gilet jaune »…).

dimanche 14 septembre 2025

Les noces rebelles (2008), de Sam Mendes

 

« Je n’ai qu’une certitude : je veux ressentir les choses. Les vivre, vraiment… tu vois ? La voilà, mon ambition. »

C’est l’histoire d’April et Frank Wheeler (Kate Winslet et Leonardo DiCaprio), un jeune couple du milieu des années 50 qui a en apparence tout pour être heureux : une belle maison spacieuse dans une banlieue pavillonnaire de New York, deux enfants et pour lui, un travail de commercial qui paie convenablement. Mais le hiatus entre cette vie conformiste et celle qu’ils s’étaient imaginés, leur rêve de s’installer à Paris qui s’est fracassé contre les récifs de la réalité, vont inexorablement faire craqueler leur couple.

C’est l’histoire du couple star de Titanic, les ravissants Kate Winslet et Leonardo DiCaprio, qui « remet le couvert » une décennie plus tard. Kathy Bates, déjà présente sur le célèbre paquebot, est elle aussi du voyage, dans le rôle de l’agente immobilière qui leur propose leur futur lieu de vie.

Près d’une décennie après l’excellentissime American Beauty, Sam Mendes reprend le thème universel de la quête du bonheur absolu pour ces Noces rebelles, adaptation du roman Revolutionary Road de Richard Yates. Le premier rôle féminin est confié à son épouse du moment, Kate Winslet, qui n’eût alors plus qu’à convaincre son ami Leonardo DiCaprio de l’accompagner dans ce projet. Cette fois, il est moins question d’une satire de la société américaine (les années 50, parfaitement reconstituées, ne sont qu’un cadre) que de l’autopsie d’un couple se désagrégeant face à l’inertie et au conformisme ambiants. Doit-on faire sagement ce que la société attend de nous (travailler dur, consommer, enfanter… pour perpétuer ce système pourtant délétère) ou vivre ses rêves ? Sommes-nous des « êtres exceptionnels » qui valons mieux que ça ou devons-nous nous résigner bon gré mal gré à mener cette vie aliénante toute tracée ? Leur projet, irréaliste, de s’installer à Paris, ville que DiCaprio avait visité et apprécié, va susciter chez leurs voisins et collègues de bureau étonnement, enthousiasme de façade mais aussi moqueries et frustration personnelle d’être eux aussi enfermés dans ce carcan, dans ces vies déprimantes (qui concernent 90 à 95% de la population, selon Mendes dans les bonus). Alors on continue de faire semblant d’être heureux, c’est moins douloureux. Interprétation topissime, jusque dans les rôles secondaires (en particulier le couple d’amis voisins et le fils « dérangé » de Bates). Jolie partition mélancolique de Thomas Newman et remarquable plan final sur le visage impassible du mari de Bates, qui préfère couper le son de son sonotone plutôt qu’écouter les propos fort hypocrites de son épouse. Au final, cette « vie rêvée des anges » (travail, famille) ne fait pas du tout envie, ça me « console » un petit peu (ou plutôt me conforte dans mes choix), moi qui n’aie rien de tout ça, par manque d’envie justement et aussi, avouons-le, de courage. Je trouve en effet que les aspects négatifs (contraintes, responsabilités, compromis, usure…) l’emportent largement sur les positifs (avoir une femme et un bébé ou enfant en bas âge dans les bras mais combien ça dure ?). Comme disait un intervenant du documentaire subversif Attention danger travail (2003) : « Moi, c’est pas des pépites de bonheur que je veux, c’est le rocher, la montagne entière. Et surtout, j’ai pas envie de chercher les pépites sous trois tonnes de merde »

mercredi 10 septembre 2025

Buffet froid (1979), de Bertrand Blier

 

« C’est pas nous qui sommes chiants, c’est la nature qu’est chiante ! Je m’emmerde, moi, j’en ai marre de la verdure, tout est vert ! »

« Qu’est-ce que vous appelez une « femme mûre » ? » - « Ben, c’est le genre de femmes qui vous fait des confitures… »

Réalisation : Bertrand Blier

Scénario : Bertrand Blier

Pays :  France

Année : 1979

Genre : comédie dramatique, surréalisme

Avec : Gérard Depardieu, Bernard Blier, Jean Carmet, Michel Serrault, Jean Rougerie, Geneviève Page, Carole Bouquet.

Synopsis : Le chômeur Alphonse Tram, l’assassin de sa femme et l’inspecteur Morvandiau sont confrontés à une série de meurtres et d’évènements rocambolesques au sein d’une tour d’immeuble isolée dans une banlieue sinistre.

Pourquoi ? Parce que c’est, de l’avis de beaucoup (dont votre serviteur), le meilleur film de Bertrand Blier, baignant dans une atmosphère surréaliste et macabre, l’un de ceux où il est le moins question de cul (lien de cause à effet ?), qui tient la route de bout en bout, là où souvent les autres réalisations du cinéaste s’essoufflent à mi-parcours après un début tonitruant ; pour son MONUMENTAL trio d’acteurs principaux Depardieu – Blier père – Carmet (le budget « bonnes bouteilles » sur le plateau a dû exploser…) et une belle galerie de seconds rôles (Serrault, Bouquet, Page, Rougerie, Benguigui) ; pour ses dialogues qui regorgent de pépites immortelles ; parce que voir des pandores simplets à képi, au temps des « Robocops » de Retailleau, quelle poilade (et nostalgie) ! « Avec le talent, on fait ce qu'on veut. Avec le génie, on fait ce qu'on peut », disait le peintre et musicien Jean-Auguste-Dominique Ingres. Pour ce film, Bertrand Blier a donc fait ce qu’il a pu…

mardi 9 septembre 2025

Les Bronzés font du ski (1979), de Patrice Leconte

 

« J’t’expliquerai, va… » - « Te casse pas, on a compris. »

« Tu m’aides pas, là ? » - « Non, pas là, non. »

Réalisation : Patrice Leconte

Scénario : les membres de la troupe du Splendid

Pays :  France

Année : 1979

Genre : comédie

Avec : Josiane Balasko, Michel Blanc, Marie-Anne Chazel, Christian Clavier, Gérard Jugnot, Dominique Lavanant, Thierry Lhermitte, Bruno Moynot.

Synopsis : Des amis, s’étant connus l’année précédente lors de vacances estivales au Club Med en Côte d’Ivoire, se retrouvent dans une station de sports d'hiver de Val-d'Isère.

Pourquoi ? Euh, sérieux, faut vraiment que je vous dise pourquoi cette comédie dont quasiment tous les gags et répliques (la « crêpe au suc’ », le « planté de bâton », la « liqueur d'échalote relevée au jus d'ail », le fil dentaire dans la fondue, le télésiège qui tombe en panne, les chaussures de ski trop serrées, le « lâché de gourmette », les effusions sexuelles du trio d’Italiens lors de la nuit au refuge…), essentiellement centrés sur le connement disparu Michel « wanabee auteur » Blanc et son incapacité à « conclure », sont culte et entrés dans l’inconscient collectif ?

lundi 8 septembre 2025

Bean, le film le plus catastrophe (1997), de Mel Smith

 

Réalisation : Mel Smith

Scénario : Richard Curtis et Robin Driscoll

Pays :  Etats-Unis, Royaume-Uni

Année : 1997

Genre : comédie

Avec : Rowan Atkinson, Peter MacNicol, Pamela Reed, Harris Yulin, Burt Reynolds.

Synopsis : Mr Bean, modeste, maladroit et excentrique gardien de musée britannique, est envoyé à Los Angeles par la National Gallery de Londres dans le cadre du transfert à la Galerie Grierson locale du célèbre tableau La Mère de Whistler, en le faisant passer pour leur meilleur spécialiste en matière de peinture, ceci afin de se débarrasser momentanément de lui. Il est accueilli en Amérique par le conservateur de la galerie et sa famille. Mais son faux profil d’érudit d’art va rapidement voler en éclat.

Pourquoi ? Pour Rowan Atkinson (doublé par Dany Boon !) et sa tronche de Jean-Pierre Chevènement jeune (mais le « Ché » a-t-il déjà été jeune ?), qui reprend évidemment son personnage de Mr Bean, sorte de Gaston Lagaffe anglais, dans la série télévisée éponyme ; mais SURTOUT pour la scène où il salope le fameux tableau à coups d’éternuement, d’encre et de détergent, qui provoque invariablement chez moi un fou rire (phénomène rarissime…) ; et pour une poignée d’autres gags, déjà connus par les « aficionados » de la série (le sac à vomi, le sèche-mains des WC, la dinde farcie géante…).


mardi 2 septembre 2025

Basic Instinct (1992), de Paul Verhoeven

 

« C’est l’histoire d’un flic, amoureux de la femme qu’il lui faut pas. »

« Je trouve que Catherine, c’est vraiment l’coup du siècle. »

Réalisation : Paul Verhoeven

Scénario : Joe Eszterhas

Pays :  Etats-Unis, France, Royaume-Uni

Année : 1992

Genre : thriller, érotique

Avec : Michael Douglas, Sharon Stone, George Dzundza, Jeanne Tripplehorn.

Synopsis : À San Francisco, Johnny Boz, un ancien rocker, est sauvagement assassiné à coups de pic à glace au cours d'un rapport sexuel. La police soupçonne la riche écrivaine Catherine Tramell, petite amie de la victime et dernière personne à avoir été vue avec lui. D’autant qu’elle décrit dans l’un de ses romans le meurtre tel qu’il s’est produit.

Pourquoi ? Parce qu’il y a tout : une intrigue policière bien ficelée, avec ce qu’il faut d’action (en l’occurrence, de poursuites automobiles), de meurtres sanglants et de rebondissements, dont le « twist » final ; les scènes de cul, très poussées (et un peu risibles et/ou gratuites, OK) pour la « provoc » ; la scène culte de l’interrogatoire avec le décroisement de jambes sans culotte de l’héroïne ; les somptueuses images de San Francisco (sa côte maritime notamment) ; l’envoutante musique de Jerry Goldsmith ; les clins d’œil à Hitchcock, plus précisément à Sueurs froides (San Francisco, la musique, le look Kim Novak de Sharon Stone) ; et, est-il besoin de le souligner, Sharon Stone, propulsée illico superstar mondiale et dont la carrière pourrait se résumer à ce rôle et à celui du Casino de Scorsese. J’y mets évidemment aussi des trucs persos (une « Madeleine de Proust », qu’on appelle ça) : l’ado que j’étais (et que je suis resté), subjugué par la beauté du minois de Sharon en couverture d’un Télé Loisirs découvert chez mes grands-parents paternels. Et parce que ce début de décennie 90, c’est vraiment l’acmé de ma « pop culture », y’avait tout : le cinoche (aussi Pretty Woman, Thelma & Louise, JFK, Terminator 2, Total Recall…), la zique avec le hard au firmament (je n’écoutais que ça à l’époque : Metallica, Nirvana, les Guns N’Roses, Megadeth…), la téloche (Nulle Part Ailleurs sur Canal avec le trio Gildas – De Caunes – Garcia et les Guignols, la Télé des Inconnus…), le foot avec l’OM au sommet en France et en Europe (avec les matchs sur Canal commentés par Biétry et Denisot. Aujourd’hui, c’est par des « épaules de serpent » en Paul Smith et Weston interchangeables et une armée de « consultants »…). Si je ne devais en garder qu’un…


mardi 26 août 2025

American Beauty (1999), de Sam Mendes

 

Réalisation : Sam Mendes

Scénario : Alan Ball

Pays :  Etats-Unis

Année : 1999

Genre : drame

Avec : Kevin Spacey, Annette Bening, Thora Birch, Wes Bentley, Mena Suvari, Peter Gallagher, Chris Cooper.

Synopsis : Lester Burnham, traverse la « crise de la quarantaine », entre son métier de cadre qu’il déteste, sa maison en banlieue, sa femme névrosée Carolyn et leur fille de 16 ans, Jane, en pleine puberté. Sa rencontre avec Angela, une des amies de Jane, va être l’occasion pour lui de se remettre totalement en question.

Pourquoi ? Pour Kevin Spacey, qui clôture ici avec un Oscar du meilleur acteur sa période faste (1995-2000) ; pour le sujet qui me parle, entre satire de la société américaine et questionnement sur le sens de l’existence, la peur de s’enfermer dans une vie conformiste et de ne pas pouvoir réaliser ses rêves, thème que reprendra Sam Mendes neuf ans plus tard dans l’également excellent Les noces rebelles, avec le couple star de Titanic ; pour la scène, proprement hilarante, où le père facho-réac et homo refoulé espionne son fils qui se trouve chez les voisins d’en face et, par illusion d’optique, croit que celui-ci est en train de tailler une pipe à Spacey.

vendredi 22 août 2025

Un air de famille (1996), de Cédric Klapisch

Nouvelle rubrique « express » pour lever le voile sur ma « DVDthèque ». Du très classique dans l’ensemble, à deux ou trois « curiosités » (toutes relatives) près.


« Bon, euh… Denis, on va arrêter cette… cette chose, là, cette espèce de relation merdeuse à la p'tite semaine, on va arrêter tout ça. »

Réalisation : Cédric Klapisch

Scénario : Cédric Klapisch, Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri

Pays :  France

Année : 1996

Genre : comédie

Avec : Jean-Pierre Bacri, Jean-Pierre Darroussin, Catherine Frot, Agnès Jaoui, Claire Maurier, Wladimir Yordanoff.

Synopsis : Comme tous les vendredis soir, la famille Ménard se réunit au bar-restaurant Au Père Tranquille, tenu dans une banlieue par l'un des fils, Henri. Cette fois-ci, c’est pour célébrer le 35ème anniversaire de Yolande, épouse de Philippe, le cadet. La soirée va rapidement tourner aux règlements de comptes.

Pourquoi ? Pour le scénario, les dialogues et les personnages, toujours finement ciselés par le duo Bacri – Jaoui ; pour Frot et Darroussin dansant sur le People Have the Power de Patti Smith ; pour la musique du générique de Philippe Eidel ; pour le clébard immobile « Caruso ».

dimanche 6 juillet 2025

La cérémonie (1995), de Claude Chabrol

 

« Il est à Mélinda, c’est Jérémie qui lui a offert pour son anniversaire. » - « Ben justement, elle n’en aura plus besoin. »

C’est l’histoire de Sophie (Sandrine Bonnaire), qui est engagée comme domestique (oui, « encore » en ce 20ème siècle finissant… Ils voudraient pas qu’on les aide aussi à se torcher, non ?) dans la demeure bretonne de la famille Lelièvre (Jean-Pierre Cassel, Jacqueline Bisset, Virginie Ledoyen et Valentin Merlet). Elle se lie d’amitié avec Jeanne (Isabelle Huppert), la postière du village, qui voue une détestation forcenée à cette famille (sentiment réciproque pour ce qui est du père de famille, qui a constaté son insolence et son incompétence) et plus généralement aux bourgeois. Peu à peu, cette dernière monte Sophie contre ses employeurs. On apprend aussi que les deux femmes ont un passé trouble.

Je l’avoue sans honte : La cérémonie, ou plus précisément son atroce et gerbant épilogue, m’a bien plus traumatisé, ou du moins hanté durablement après visionnage, que nombre de films d’horreur ou même Seven, Shining, Psychose ou Les dents de la mer, classiques de ma DVDthèque depuis « digérés ». Sans doute car l’horreur se déploie ici dans un cadre plus réaliste et qu’elle y est glaçante. Il est vrai aussi que je suis d’un naturel (très) sensible et ça ne s’arrange pas avec l’âge, bien au contraire. Quoi qu’il en soit, qui aurait cru que ce sentiment d’effroi puisse surgir d’une œuvre du jovial Claude Chabrol, figure de proue de la fameuse (et fumeuse ?) « Nouvelle Vague » dont il disait qu’« il n’y a pas de Nouvelle Vague, il n’y a que la mer » et fin observateur (et peintre) de l’univers feutré de la petite bourgeoisie de province ? Quoique, en jetant un coup d’œil à sa foisonnante filmographie, on ne s’en étonnera finalement pas tant que ça (Que la bête meure, Le boucher, Violette Nozière, Les fantômes du chapelier, L’enfer…Du déjà bien « flippant »).

Mais pour tout dire, je n’y crois pas tellement, à cette histoire. Ce n’est pas moi le psy, c’est Caroline Eliacheff, coscénariste, mais je trouve qu’il manque une gradation dans la tension, une ou deux scènes supplémentaires pouvant « expliquer » le passage à l’acte. A aucun moment dans le film, on ne s’attend à voir les deux femmes sombrer dans la folie meurtrière, même quelques instants avant le drame. Les Lelièvre ne sont pas particulièrement odieux, notamment Virginie Ledoyen, très prévenante et s’ils se laissent parfois aller à quelques remarques blessantes en privé, c’est davantage par réflexe de classe que par réelle méchanceté. Et puis j’aurais vu l’explosion de cette rage contenue s’accompagner d’une intensité vocale et sonore ad hoc. Or, pas du tout, les deux femmes sont d’une froideur, d’un détachement, d’un cynisme inouïs, comme si elles accomplissaient un acte tout à fait banal et anodin. Là est d'ailleurs peut-être le plus choquant. Les seules émotions qui transparaissent chez Bonnaire sont la peur panique lorsqu’elle est directement confrontée à son handicap (elle est analphabète, c’est justement cette découverte par Ledoyen qui sera le déclencheur de l’engrenage meurtrier) et quelquefois la joie avec Huppert. Sinon, elle donne du « je sais pas », « j’ai compris » ou du « bien Monsieur / Madame / Mademoiselle » à tire-larigot. Huppert (César de la Meilleure actrice, son premier, elle en obtiendra un autre en 2017 pour le Elle de Verhoeven), elle, est plus expressive et dévergondée, plus sournoise (et toxique !) aussi.

Le film, librement inspiré de la célèbre « affaire des sœurs Papin » de 1933 (j’invite ceux qui pensent que la violence est l’apanage de notre société contemporaine à y jeter un… œil, c’est le cas de le dire…), a beaucoup été « vendu » comme le « dernier film marxiste ». Soit. Les différences de classes sociales sont ici exprimées, voire surlignées, par le prisme des goûts culturels : aux bourges l’opéra et la littérature, aux prolos les films commerciaux (« avec Paul Newman ») et la « télé-poubelle ». Mais il y a d’autres thématiques, comme l’effet d’entrainement avec l’attitude « pousse-au-crime » insidieusement instillée par le personnage d’Huppert. J’ajouterais aussi le lesbianisme entre les deux héroïnes, qui m’apparait sinon évident, au moins envisageable en filigrane (rires sur la couette, baisers sur la joue appuyés).

J’ai bien fait de revoir le film et surtout de lire sa fiche Wikipedia car un élément du final m’avait complètement échappé lors de mon premier visionnage. En effet, je n’avais pas saisi que le radio-cassette qu’emporte Huppert après le carnage avait enregistré son aparté avec Bonnaire à l’issue de celui-ci (les Lelièvre ayant souhaité enregistrer l’opéra de Mozart qui passait à la télé à ce moment-là). Ainsi, je pensais que la police, retrouvant l’appareil dans sa voiture accidentée, lui ferait porter l’entière responsabilité du crime à titre posthume, Bonnaire s’en tirant à bon compte. Mais avec l’enregistrement de la discussion des deux femmes, signant leur complicité, c’est différent. Une fin morale, donc, l’une mourant dans un accident de voiture, l’autre n’échappant vraisemblablement pas à une future interpellation mais bien trouvée grâce à l’astuce du radio-cassette et suffisamment implicite.

jeudi 1 mai 2025

Les côtelettes (2003), de Bertrand Blier

 

« Avant, on disait « bonne » mais maintenant on dit « femme de ménage ». Mais enfin, on dit toujours « merde ». Et faut toujours la nettoyer, ça, ça n’a pas changé. »

C’est l’histoire d’un vieux con pauvre de droite qui frappe chez un vieux con riche de gauche pour « venir le faire chier ». Ils discutent de choses et d’autres, comme du sort que l’on réserve aux traces d’excréments qui restent collées au WC une fois la chasse d’eau tirée selon qu’on soit un « gros con de gauche » ou un « gros con de droite ». Mais surtout de Nacifa, leur femme de ménage dont ils sont tous deux amoureux.

C’est avec qui ? Philippe Noiret et Michel Bouquet incarnent les deux personnages principaux, Farida Rahouadj la femme de ménage et Catherine Hiegel… la Mort.

Et c’est comment ? Pour filer la métaphore culinaire… savoureux. Voila ce que je considère comme le meilleur Blier (adaptation de sa pièce éponyme de 1997) de ces vingt-cinq dernières années (voire plus, n’ayant pas encore vu Mon homme), et de loin. C’est la dernière fois que le réalisateur aura à sa disposition de grands acteurs (que dis-je, des « monstres sacrés ») et je ne pense pas que le film m’aurait fait le même effet avec Campan, Dujardin ou même Dupontel et Clavier. Je ne sais pas si j’aime le cinéma (oui, quand même mais moins que la musique) mais j’aime les acteurs. L’expression du visage de Geena Davis à la fin de Thelma & Louise, Depardieu en Cyrano, Azéma qui fait la foldingue chez Resnais (ou Chatiliez), Myriam Boyer et Anouk Grinberg singeant des écolières dans Un, deux, trois, soleil… Ces moments d’émotion, de grâce, de rire, suscitant chez moi émerveillement et une profonde admiration pour celles et ceux qui les véhiculent, sont innombrables. La tirade de Noiret, métaphore scatologique sur la prise de conscience, fait partie de ceux-là. Peu auraient pu la jouer comme lui. Quand à la question « savez-vous comment on reconnait un gros con de droite d’un gros con de gauche ? », assis sur son fauteuil, il lève les yeux vers Bouquet et lui dit « quand vous chiez. Vous avez beau chier proprement (sic), tirer la chasse et tout, très souvent, dans la cuvette, y’a de la merde qui reste, collée ? », je suis plié ! Dans le fond, j’adhère au propos et au constat mais je peux comprendre que si l’on est de « l’autre rive », on puisse trouver ça moralisateur et / ou misérabiliste (Rahouadj le visage abattu, le dos vouté, transportant ses sacs de courses). Cela dit, en y réfléchissant (j’avoue que ce n’est pas le genre de choses qui occupent mon esprit en priorité…😄), cette « théorie » a du plomb dans l’aile. En effet, quid des centristes et des abstentionnistes ? Ils nettoient seulement une partie des traces et laissent les autres telles quelles ? Et ceux qui, frappés de diarrhée ou au contraire de constipation, ont des selles si molles ou si dures qu’elles ne laissent aucune trace, à quel camp appartiennent-ils ? Bon, on ne va pas y passer la nuit non plus, hein… Et quand Bouquet répète à plusieurs reprises « qu’il bande » (c’est dans la bande-annonce), pareil, grand moment. Autre point positif, Rahouadj a pour une fois un « vrai » rôle central à défendre, là où dans les autres films de son compagnon de réalisateur, elle fait « pièce rapportée ». J’ai également apprécié la musique et la mise en scène : Bouquet et Noiret conversent dans le salon de ce dernier puis le plan d’après, on les retrouve dans un commerce alimentaire ou marchant dans un champ, pendant qu’ils poursuivent leur discussion… Procédé surréaliste qui rend l’ensemble plus vivant. Le final à l’hôpital, avec les infirmes qui se mettent à danser pendant que Noiret et Bouquet prennent à tour de rôle Hiegel en levrette (attention, symbole : on nique la mort !), part un peu en vrille (j’ai coutume de penser que lorsqu’on filme des scènes de danse, c’est pour meubler, masquer un manque d’inspiration) mais on a l’habitude, Blier a souvent du mal à finir ses films (Tenue de soirée en étant le meilleur exemple). Pas de quoi cependant gâcher mon plaisir et faire pencher la balance du mauvais côté.

Côtelettes : non

Piscine ensanglantée : oui

Femme à poil : oui (Rahouadj allongée de profil sur une table de réanimation et, si ma mémoire est bonne, la poitrine de la compagne de Noiret, vers le début)

vendredi 28 mars 2025

Tandem (1987), de Patrice Leconte

 

« Ne vous excusez pas. Vous ne pouviez pas savoir que vous étiez invité au club des cons. »

C’est l’histoire de Miguel… euh, Michel Mortez, « vieux beau » un peu pathétique et animateur de radio sur le retour, de Rivetot, son fidèle assistant et homme à tout faire et de leur jeu radiophonique itinérant La langue au chat. Les petites villes de province, les candidats, les hôtels miteux, les repas chez les notables locaux… Tous les jours c’est pareil et tous les jours c’est différent. Un jour, Rivetot apprend que leur émission va être supprimée. Conscient qu’elle est pour ainsi dire la seule raison de vivre de Mortez, il décide de ne pas lui faire part de cette terrible nouvelle.

Y’a qui dedans ? Jean Rochefort, qui trouve en Mortez un rôle à sa (dé)mesure et Gérard Jugnot, sans moustache mais avec moumoute, qui change de registre et apparait pour une fois plutôt sympathique. Plus une belle galerie de seconds rôles (Jean-Claude Dreyfus en notable, Julie Jézéquel en soubrette libérée ou encore Ged Marlon en candidat-surprise à très faible culture générale trouvé sur le bord de la route).

Et c’est bien ? Tout est dantesque, ici. Le scénario, entre « road » et « buddy movie » (oui, encore), est des plus originaux. Le duo d’acteur est idéal et le film oscille avec bonheur entre moments comiques et d’autres plus émouvants. Et des scènes mémorables, en veux-tu en voilà : Rochefort ivre au casino ou pris d’une crise d’angoisse dans la chambre d’hôtel (« Les deux lits, la table de nuit au milieu, les appliques dorées, le cagibi – salle de bain, les couvre-lits synthétiques… ») ; le barman de l’hôtel, homo sous ses attraits bourrus (« J’te fais une petite pipe, Michel ? ») ; le repas chez les notables, où Rochefort est assailli par les questions d’un Jean-Claude Dreyfus exalté ; Julie Jézéquel glaçant Jugnot avec ses allusions salaces (« T’as déjà imaginé ton père en plein orgasme ? ») ; Ged Marlon, grignotant des chips et incapable de répondre à la moindre question (pourtant faciles : bacille de Koch, Statue de la Liberté…) lors du jeu improvisé, après s’être fait houspillé pour avoir pique-niqué trop près du bord de la route par un Rochefort excédé (« On devrait créer des brigades esthétiques et interdire le port du survêtement en dehors des enceintes des stades ! ») ; la scène entre Sylvie Granotier et Rochefort (« Excusez-moi, je ne voulais pas vous faire de mal » - « Et bien, c’est fait. Bonsoir »)… Ne reste plus qu’à ajouter Il mio rifugio, un poignant piano-voix chanté de sa voix rauque par le franco-italien Richard Cocciante, qui parcourt tout le film. Patrice Leconte n’avait jusqu’ici réalisé que des comédies et un film d’action (Les spécialistes). Cette première incursion dans un registre plus grave et intimiste (même si toujours drôle) est un coup de maître. Il récidivera deux ans plus tard avec Monsieur Hire. De façon plus personnelle, ce film a aussi une résonnance particulière pour moi dans la mesure où je l’ai vu de nombreuses fois dans mon adolescence en compagnie de mon défunt père, lui-même animateur d’une radio locale (bénévolement, dans le domaine culturel puis politique) un peu fantasque et portant le même prénom que le personnage principal. 

Pompiste : oui

Chien rouge : non

Hôtel « 3 étoiles » : non

Homme ou femme à poil : un plan furtif sur une paire de fesses recevant une piqure, supposée appartenir à Rochefort mais dont on peut raisonnablement douter que ce soit véritablement le cas

mercredi 19 mars 2025

Le fantôme de la liberté (1974), de Luis Buñuel

 

« Non, ne partez pas… Que les moines restent, au moins ! »

C’est l’histoire… inracontable de plusieurs histoires. Une sorte de film à sketchs mais reliés entre eux. On suit l’histoire d’un personnage qui en croise un autre, dont on suit à son tour l’histoire et ainsi de suite. Un couple intercepte les photos, qu’il juge obscènes, données à sa fille par un inconnu dans un parc et licencie sur le champ sa bonne qui en avait la garde. Des photos… de monuments parisiens… ; une infirmière se voit contrainte de passer une nuit dans une auberge, où elle rencontre quatre moines, un jeune homme avec sa bien plus âgée compagne et… un couple sadomasochiste ; un professeur tient un cours sur l’évolution des mœurs dans une caserne de policiers. Il leur narre une réunion entre amis fictive où les convives discutent autour d’une table tout en faisant leurs besoins avant, si l’envie leur prend, d’aller s’enfermer seul dans la salle à manger pour se restaurer ; un couple lance un avis de recherche pour retrouver sa petite fille disparue dans son école… alors qu’elle se trouve sous ses yeux ; un assassin fusille des badauds au hasard du haut d’une tour. Arrêté et jugé, il est condamné à mort et… libéré sur le champ, félicité, signant même des autographes ; un « vrai faux » (à moins que ce ne soit l’inverse ?) préfet de police se fait interpeller dans son caveau familial : sa défunte sœur… venait de lui téléphoner.

C’est avec qui ? Jean-Claude Brialy, Michael Lonsdale, Jean Rochefort, Julien Bertheau, Michel Piccoli, Claude Piéplu. On reconnait aussi Paul Frankeur (qui décèdera peu après), Pierre Maguelon, Orane Demazis, Jean Rougerie, la pauvre Marie-France Pisier (décédée curieusement et mêlée malgré elle à l’ignominieuse « affaire Duhamel »), Paul Le Person et le jeune futur humoriste Guy Montagné dans le rôle d’un moine.

Et c’est bien ? Mon Buñuel préféré (pour le moment). La construction du film et ses saynètes sont géniales. Tous les postulats de la raison et de la bienséance sont renversés. Jubilatoire.

Autruche : oui

Photo de l’Arc de Triomphe : oui

Femme et homme à poil : oui. Adriana Asti nous montre sa magnifique poitrine et Michael Lonsdale son postérieur, avant qu’il n’aille se le faire fouetter. On a aussi le haut et le bas de la doublure de la compagne âgée du jeune homme à l’auberge

lundi 17 mars 2025

Thelma & Louise (1991), de Ridley Scott

 

C’est l’histoire de Thelma, femme au foyer bridée et brimée par son beauf de mari (toute la panoplie : la petite moustache, la gourmette, le marcel, le pack de bière devant le match télévisé de foot américain…) et de son amie Louise, serveuse dans une cafétéria, qui décident de passer un week-end « entre filles ». Hélas pour elles, leur passage dans une boite de nuit tourne mal : Louise abat un homme qui s’apprêtait à violer Thelma. Dès lors, pas d’autre issue que la fuite à travers l’Amérique…

Y’a qui dedans ? Geena Davis et Susan Sarandon (une femme bien) en sont les héroïnes. Elles sont accompagnées de Michael Madsen, Harvey Keitel et d’un Brad Pitt (plus vieux que notre ancien Premier Ministre Jean Castex. Ca casse un peu le mythe, hein ?) alors en tout début de carrière.

Et c’est bien ? Pffff, cette question… Rien que d’en parler, j’en ai les larmes aux yeux. Alors le fameux final, c’est carrément les « grandes eaux ». Mais bon, je chiale à tout, de toutes façons (un drame, un visage, une chanson au hasard, Back To Black d'Amy « Maison du vin » la bien nommée ou Heaven Or Las Vegas des Cocteau Twins – et même… une interview de Dominique De Villepin, c’est dire…). Ce n’est pas, je pense, faire injure à Susan Sarandon que de dire que c’est Geena Davis (de dix ans sa cadette) qui porte littéralement le film de bout en bout. Quelle expressivité, l’anti-Steven Seagal ! A l’exception notable de Madsen et Keitel, tous les mecs sont des connards et se font bien remettre à leur place (voire pire) par nos deux dames de choc (à part Pitt qui s’en sort en les bananant). Alors bien sûr, à notre époque de guerre des sexes, le film passe pour un puissant et précurseur manifeste féministe. Mais il y a 34 années de ça (même si j’ai dû le voir quelques années après sa sortie), on ne se posait pas toutes ces questions. Femmes ou hommes, c’était juste un sacré bon film. Et ça le reste toujours. « Iconique », comme diraient les « Gén Z »…

Cadillac turquoise : oui

Cycliste rasta : oui

Femme et homme à poil : y’a bien une scène de cul entre Geena Davis et Brad Pitt mais c’est filmé de façon à ce qu’on ne voit rien ou presque