mercredi 23 juillet 2025

Le juge et l’assassin (1976), de Bertrand Tavernier

 

« Un fou qui sait qu’il est fou est un fou guéri. »

C’est l’histoire de Joseph Bouvier (Michel Galabru), un anarchiste rustre, qui tire sur la femme qui refusait de l’épouser avant de tenter de se suicider. Elle survit et lui aussi, malgré deux balles dans la tête (!). Libéré d’un asile, il vagabonde dans toute la France et viole et assassine les jeunes bergers ou bergères qu’il croise. Émile Rousseau (Philippe Noiret), un juge de province arriviste, parvient à le faire arrêter. Espérant une promotion, il tente de gagner la confiance de Bouvier afin de lui extirper des aveux et ainsi obtenir sa condamnation à mort.

Tavernier – Noiret, acte 3 (y’en aura deux autres, Que la fête commence… et La vie et rien d’autre, malgré des contextes qui ne m’enchantent guère : 18ème siècle pour le premier, Première guerre mondiale pour le second…). L’acteur campe un beau salaud en la personne de ce juge manipulateur et cynique. Mais c’est bien sûr Michel Galabru, pour son plus grand fait d’armes, qui crève l’écran, obtenant le César du meilleur acteur pour le rôle de ce « serial-killer » exalté et mystique (le film remportera aussi celui du meilleur scénario). Isabelle Huppert (maitresse de Noiret, encore bien casée) et Jean-Claude Brialy (procureur), complètent la distribution. Gérard Jugnot et Yves Robert font également des apparitions. Tourné dans les paysages variés de l’Ardèche et inspiré de la vie du « Jack l'Éventreur du Sud-Est » Joseph Vacher, le film comporte à mon avis quelques longueurs (il fait deux heures), en particulier à cause de la présence de trois chansons (signées Jean-Roger Caussimon, il en interprète lui-même deux). Il est éminemment politique (même s’il n’est pas que ça) puisque, outre le thème de la peine de mort, il se déroule à la fin du 19ème siècle, une époque marquée par l’affaire Dreyfus (« A mort Dreyfus » tagué sur un mur de la prison, affiche « Lisez La Croix, le journal le plus anti-juif de France »…) et les luttes ouvrières de la Commune. La fin, qui relate ces dernières et que Tavernier juge lui-même « ratée » (non pas dans le propos, qu’il assume et revendique totalement mais dans la forme, trop démonstrative), m’a d’ailleurs plombé, entrant chez moi en résonance avec l’actualité nationale récente. On n’a pas évolué d’un pouce (130 ans, ça peut paraître beaucoup mais à l’échelle de l’humanité, c’est peanuts…), les époques et les noms des protagonistes changent mais, contrairement à ce qu’on veut bien nous faire croire, la fracture et les antagonismes demeurent et ne sont pas près de disparaitre, malgré notre individualisme et le pouvoir anesthésiant du confort dont nous jouissons à des degrés divers.

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